Publié le 30 septembre 2025
Préface
J’ai longtemps été complexé par mon nez. Parce qu’il était un peu épaté. Et parce qu’il ressemblait à celui de mon père. Dans la cour du collège, on m’interpellait : « Si-mon-net était moins gros… » C’était l’âge de l’adolescence. Des complexes.
Le nez a cette particularité d’être visible « comme le nez au milieu du visage ». D’où son importance dans notre perception de soi. Pourtant, et c’est un des paradoxes, on ne le remarque pas souvent. Il est au centre et nulle part. C’est un peu comme s’il avait été entouré de fées à sa naissance qui lui auraient dit : « Tant qu’on ne te remarquera pas, tu seras laissé pour compte. En particulier, ton odorat restera le parent pauvre des cinq sens. »
« Tant qu’on ne te remarquera pas… » Heureusement, des artistes ont décidé de prendre ce problème à bras le corps. Ainsi, le photographe Dominique Pasquet a invité des « nez » à mettre leur odorat au service de la vue. Pour cela, il leur a suggéré de convoquer un souvenir olfactif. L’une des participants raconte : « Le cliché qui me concerne a été pris deux mois seulement après mon accouchement lorsque le corps d’une femme se reconstruit et que les odeurs pourtant si prégnantes pendant la grossesse prennent de moins en moins de place (…) »
Habillé.e en noir, chaque modèle a ainsi expérimenté ce que l’une nomme « un voyage quasiment méditatif ». Une troisième conclut : « J’inspire tout doucement. L’air gonfle ma poitrine. Et je sens... simplement, exclusivement et intensément ».
Mathieu Simonet
Ecrivain
